A propos de "Réelle présence" de George Steiner
Les sculptures, peintures, œuvres littéraires et musicales possèdent la faculté de tirer du quotidien ceux et celles qui les regardent, lisent ou écoutent. Elles donnent accès à un domaine qui n’est pas celui du répétitif mais celui du tout autre... Lire la suite
Les sculptures, peintures, œuvres littéraires et musicales possèdent la faculté de tirer du quotidien ceux et celles qui les regardent, lisent ou écoutent. Elles donnent accès à un domaine qui n’est pas celui du répétitif mais celui du tout autre [1]. Elles nous convient à un changement de perspective et en ce sens ont une fonction révélatrice, transformatrice.
L’essayiste George Steiner désigne par « réelle présence », l’éclat, le rayonnement d’une œuvre qui est de l’ordre de l’existentiel, du fondamental. Il précise que « les écrits, œuvres d’art, les compositions musicales qui constituent des références centrales comportent ce qui est ‘grave et constant’ (les épithètes sont de Joyce) dans le mystère de notre condition ».
D’après Steiner, les processus de transformation déclenchés par l’esthétique sont évidents : de la rencontre avec un poème, une pièce de théâtre, un roman, un tableau peut naître une interrogation sur les possibilités de la vie, sur les formes implicites de l’être. La poésie, la littérature, la musique mettent les hommes et les femmes le plus directement en relation avec ce qui en eux, n’est pas eux.
Dans son livre intitulé précisément « Réelles Présences » [2] Steiner rejette l’idée selon laquelle « les intentions du créateur n’importent pas », dénonce le fait que « seul compterait ce qu’arbitrairement nous mettrions dans l’œuvre que nous déconstruirions ». Face à ce mode de l’interchangeabilité du sens d’une œuvre, il convie chacun d’entre nous à parier sur la recherche du sens de celle-ci, à en comprendre la nécessité. Il est vital de lire un texte, voir un tableau, écouter une sonate pour ce qu’ils sont.
Notes
[1] A vrai dire, le quotidien ne perd rien de sa valeur ; il est rehaussé.
[2] Steiner George, Réelles Présences, Gallimard, 1991
article publié le vendredi 1er juin 2007 et lu 10286 fois.
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